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Louise, Julie Gouazé,

éditions Léo Scheer

Résumé :

 

Juin 1995, à Lyon. Louise a dix-huit ans. Son icône, sa soeur aînée Alice, rentre d'Allemagne avec son fils Jean. Alice est malade, elle est alcoolique. Tout s'écroule pour Louise. La tristesse, l'angoisse et la honte s'abattent sur la famille entière. Comment désormais s'extraire de cette cellule, autrefois si joyeuse, que la culpabilité va fermer à double tour ?Louise devient le soleil de la maison. Marie et Roger, ses parents, font face avec les moyens du bord. Marie investit la cuisine comme dernier rempart avant l'explosion. Alice va toucher le fond. Alors Louise décide de rester mais sans renoncer à la volonté de s'émanciper, de découvrir le « dehors » de la maison et d'échapper au « dedans » qui l'oppresse. Louise va goûter à la liberté, quitte à se casser les dents au passage – ce passage obligé vers la maturité. Succession d'instantanés en accéléré, cadencés, qui bousculent la linéarité du récit, comme des bribes de souvenirs, des sensations, des photos délavées qui disent les moments de joie, les colères et les peines, Louise est un Bildungsroman basé sur le parcours courageux et sincère, comme l'est celui de chacun d'entre nous, de Louise, et de celui de sa soeur en filigrane. Alice, qui va guérir, recommencer à vivre. Louise, qui va devenir mère à son tour, après avoir réussi à « éjecter cette part d'enfance qui l'empêchait d'enfanter ». Marie et Roger, qui vont (presque) y survivre. Jean qui va grandir. Surmontant peu à peu les crises d'angoisse qui l'étreignent soudain, sans raison, Louise se dit que le meilleur est toujours à venir.

 

Mon avis :

 

      Je n’aime pas les récits aux phrases courtes. Celles qui s’enchaînent. Comme si la virgule n’existait pas. Comme si seul le point était une ponctuation valide. L’impression de caler tous les 10 mètres. Trop saccadé. Peu lisible. Enfin, d’habitude. D’habitude je n’aime pas. Louise est une exception. Ce style d’écriture vient-il des contraintes journalistiques que connaît l’auteure ? Ou bien est-ce sa véritable expression, du plus profond d’elle-même ? Sa vraie langue ? Son langage ? Celui de phrases qui se choquent les unes aux autres, se bugnent, se fracassent pour mieux nous frapper. Car c’est cela Louise : des mots qui nous heurtent, nous pénètrent sans prendre la peine de s’enrober du sucre coutumier des belles phrases pour faire passer l’éventuelle laideur de ce qu’elles traduisent. Julie Gouazé prend le par(t)i de nous livrer la beauté brute des mots. Ils sont choisis. Ils sont justes. Ils n’ont finalement besoin de rien d’autre.

      Louise, c’est donc la superbe découverte d’une auteure, de son style, d’une vision ou d’un prisme particulier portée sur une histoire certainement déjà traitée qui ne fait en rien rêver sur le papier. Enfin, si : il suffit que le papier soit signé Julie Gouazé pour cela. De quoi parle ce livre ? De l’alcoolisme, oui. Mais aussi de l’enfance. Mais aussi de la vie. Dans ce qu’elle a de plus brut. Dans ce qu’elle a de plus vrai. L’héroïne devient comme une amie. On finit par l’attendre au pas de sa porte, et on retrouve le livre comme on retrouverait Louise. L’empathie nous gagne, nous souffrons et rions presque avec elle. Presque seulement, car les sujets traités ici le sont de manière si justes et sont si précis qu’on ne peut qu’imaginer… comme lorsqu’un(e) ami(e) nous parle d’une expérience que nous n’avons pas vécue, tout simplement. « La souffrance ne se partage pas ».

      Une telle proximité de lecture m’amène toutefois à me poser une question : qui est réellement Louise ? Ou plutôt, je me demande à quel point Louise est Julie. Parce que par sa plume, la seconde nous raccroche à la première. « Deux lettres en plus : se raccrocher. A quelque chose. A quelqu’un ». A un livre. A Louise. On se sent proche. Peut-être plus qu’on ne le devrait.

      J’ignore pourquoi, mais lorsque la dernière page fut lue, ma gorge s’est serrée. Ce livre est allé chercher quelque chose au fond de moi. Plusieurs choses. Certaines sont ressorties. Je n’ai pas l’habitude de passer du dedans au dehors. Je ne sais pas faire. Les valves se sont fermées. Pas les cicatrices. Ce livre fait du bien en faisant mal. C’est un formidable cadeau.

 

      Un premier roman d’une rare qualité, petit joyau de cette rentrée littéraire et une grande découverte pour ses lecteurs. Pas besoin d’être un(e) gone de Lyon pour qu’il vous reste dans la caboche.

 

En un mot comme en cent : jetez-y vous !

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